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Affichage des articles du janvier, 2016

Pas de pitié

Il y a de la laine brute entre mes narines. Il y a un jour sans fin qui recommence chaque jour. Je vais voir dans l'au-delà s'il y a un homme Qui se prénomme Éric. J'ai des sous dans les poches Et des poches sous les yeux. J'écarte le nez des mammifères Avec un doigt lourd. Le temps tape un chien Pour qu'il avance. Des décibels de nuits Font la valse Sous les cimetières. Une colombe coud Un alligator souffrant. Je jette ma main Dans l'eau qui traîne. Pas de pitié pour Éric, Pas de pitié pour l'alligator. Le chien recule. La voiture articule. Le chat mord mes testicules... Pas de pitié pour les hommes.

Le chat, la souris et la tête de renard

Une tête de renard Suffoque sous un drap. Des passants s'attardent Au coin de la rue Pour voir une cuillère Rouler à toute vitesse. Un chat accouche de ses mémoires Dans un livre édité par Albin Michel Dont le titre est : « Pourquoi je n'ai pas attrapé la souris ». La tête de renard souffle, Va en librairie et achète le livre. Elle le lit, lentement, Suffoque de temps en temps, Fume une cigarette, Puis deux, Et dit, d'un air étonné : « La souris, c'est moi. » Le renard rencontre le chat Dans un dîner en tête-à-tête. Le chat mange la tête de renard Puis boit un verre d'eau. « La souris ce n'était pas moi », Se dit le renard dans le ventre du chat.

Le ciel est un chauffage

Le ciel est un chauffage, Le ciel est un chauffage Et j'ai froid aux doigts. Pendant que j'écris mes pensées, Il y a un homme nu qui marche Dans le métro parisien En attendant le ligne 14. Je bouscule deux sens contraires Et un automate fabrique son propre robot En m'admirant. Les nuits deviennent plus chaudes, Un oiseau danse sur la vertèbre D'un boxeur mort. Le miroir a de gros sourcils Et un ventre pour écraser Ceux qui s'y mirent. Le ciel est un édredon à cinq places. Le sommeil ne se regarde pas dormir. Alors, je console mon ombre quelques secondes Avant de lui dire un mot doux. Pour qu'elle dorme, Encore.

Le docteur est passé

Le docteur est passé, Il a mouillé  ses mains dans le lavabo. Le docteur est passé, Il y a des éléphants qui chantent A côté de mon téléphone. Une oie à la voix grave Se jette au sol. Des plastiques s'envolent Au-dessus de Paris. Une masse grouillante de mots Font la chenille devant ma maison. Le docteur est passé, Il a mouillé ses mains dans le lavabo.

Le lutin

Le lutin est parti. Un homme, de douze ans Mon aîné, Sort son fusil en entendant L'oiseau à quatre ailes faire ses emplettes Dans un magasin de fourniture pour cochon. Le lutin est parti et pourtant, la nuit Ne fait que commencer Ou plutôt ne fait que commercer Avec le jeune homme que je suis Le prix de mon sommeil. Il est trois heures du matin, Des montagnes de crânes Remplissent mon lit Et j'ai des pensées de yaourt Et de lait au frigo. Alors je verse ma peau sur le lit, Avec un ordinateur qui somnole, Il ronfle, Il redémarre. Le lutin est parti et ne reviendra peut-être pas. On ne sait jamais. Il est trois heures, Sydney s'éveille.

Le soleil fait la fine bouche

Le soleil fait la fine bouche Quand arrive l'hiver. Les yeux dans les yeux, Je me dis les quatre vérités Et les cinq prénoms de mes futurs enfants. Il y a un ciel qui miaule, Il y a un ciel qui miaule, Je ne le connais pas, Il est devenu rustre, Sans aucune éducation, Il emporte les gens Sans leur dire bonjour. Une soucoupe volante Fait du couscous à un homme Allongé sur la chaussée. Mon corps est de plus en plus Surpris par ses os. Ils sautillent sous ma peau Comme des câpres. Un négociateur vient me demander S'il peut utiliser mes toilettes. Je lui dis oui mais il y a un homme Qui y est déjà, Depuis cinq siècles. C'est un de mes futurs enfants.

Vieillard

Le monde a des pieds En forme de léopards. Je passe ma vie à regretter Le temps où je pleurais La mort d'un vieillard. Le son de mon ventre Est le même que celui De l'orage. Un temps passe, Deux temps passent, Et la Terre se retrouve éparpillée En mille voix décoratives. Le chêne mange une pomme, Le principe de se mouvoir Entre les lignes fracasse Ma propre démarche. Je ne rentre pas dans les supermarchés En attendant la fin du capitalisme. Alors je récapitule un peu toute ma vie. Et je pleure en entendant la toux d'un vieillard.

Mon dos

Le cœur grille-pain. Un assemblage d'os courbés Se jettent sur la chaussée. Un aiglon fait la manche aux nuages. Je participe à ma propre fête Avec mes outils de bricolage. Le chêne tombe avec fracas, Un oiseau penche son bec Sur le sol en marbre. Des brindilles d'yeux allongés Font frémir le reste de cerveau Que j'ai en stock. Des magasins font leurs lacets. Un homme descend dans la cage à poivre. Mon dos me fait mal. Mon dos me fait mal. J'enterre le bruit du monde Sur ma frontière.

Huile de cade par Danielle Masson - Les vases communicants Janvier

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Tu as entendu ce qu’elle vient de lui dire, dit Platon l’âne clair Je n’écoute pas aux portes, répond tranquillement Socrate, l’âne marron foncé Quelle porte. Tu vois une porte où toi ? C’est une expression comme… faire l’âne pour avoir du son Parce que on va avoir de la musique ici maintenant, rêve tout haut Platon Tu es incorrigible, tout à prendre au pied de la lettre ! Tu ne m’as pas répondu, je suis un peu dur de la feuille Feuille de chou, feuille de laitue, feuille de chêne, feuille de chou … chantonne Socrate Du chou vert pour le repas de ce soir, se délecte d’avance Platon Et ça continue… tu es à côté de la plaque… T’as toujours pas répondu, elle a parlé de coude, j’ai peur Mais non, t’as rien au coude, sacré Platon Huile de coude, c’est cela dont elle a parlé Mais non, elle a dit qu’il fallait te passer de l’huile de cade De l’huile de cade ? répète, d’une voix tremblante Platon > âne  1