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Tout est dépeuplé

Le manque de cœur Apporte des turpitudes Aux plantes. Les enfants font la vaisselle Le matin très tôt afin De manger avec Leur mère. Les journées portent Des masques pour ne pas Se faire contrôler aux frontières. Un homme cherche son rat pendant Que la Terre tourne. Une mirabelle produit de la laine Avec la tête d'un hamster. Une cicatrice s'ouvre et se referme Comme des portes automatiques. Un nuage fait froid dans le dos. Une soupe se prépare à dîner. Des bras agrippent un corps Encore sous le soleil. Je m'arrache la peau pour voir Ce qu'il y a en dessous. Une lune s'éteint. Des brûlures tombent. Un immeuble fait fuir ses habitants. Un geste Et tout est dépeuplé.

Micro-onde

Un enfant marche Pour mieux absorber le monde avec ses yeux. Un micro-onde gris grille Un pain, une pastèque Et un jardin en quelques minutes. Je tape à la porte pour savoir Si le monde est encore là. Il est fatigué, il a un œil crevé Et des béquilles. Mon miroir est étanche. Je nage, je nage au-dessus De la mer. Les coquillages roulent entre Mes narines, Un papa et une maman Font la lessive, Des automates travaillent Sans relâche à la fin du monde. Une cigarette se fume derrière un bosquet. Une angoisse compte Le nombre de deuils Sur ses doigts. Un homme arrache le pinceau D'un peintre. Il représentait un nénuphar Dormant sur un phacochère. C'est un blasphème.

Madame l'Autruche

Laisser poindre une once de café Dans le verre d'alcool de Madame l'Autruche. L’Autriche est un pays, Je suis un pays Qui ressemble à s'y méprendre A un siècle. J'ouvre la porte bien fort Et entre dans le café Avec ma femme Et nos quatre enfants. Un homme cherche son nid Avec ses pieds. Il ne le trouve pas, Alors il prend un plat de pâtes Pendant que les vigiles Inspectent le sac à dos D'un jeune garçon. Les journées se rassemblent En troupe d'élite Et dorment En attendant que l'hiver Trompe l'ennui. Nous sommes en août Et pas en septembre. C'est peut-être pour ça Que la vie s'adoucit Peu à peu, Jusqu'à ressembler A un nénuphar vert.

Un nain fait la courte échelle

Le matin a deux bras, deux jambes Pour attraper les voleurs. Les doux matins que ma mère m'offrait Était fait d'idées neuves et d'eau fraîche. Je ne suis pas un robot en forme d'humain, Je suis plutôt un humain en forme de robot. Les ascenseurs contractent leurs poumons, Une femme s'assoit entre le marteau et l'enclume, Une cigarette s'éteint et se rallume, Un homme dans sa trentaine me regarde Avec un air de ne pas y toucher, Une langue s'étale sur la chaussée, Mille oiseaux s'écoutent parler A propos de la sortie de l'Europe, Un nain fait la courte échelle A un géant, Des miroirs atteignent la taille Des géants Et on ne peut plus mourir On ne peut plus mourir.

Je vis

Parfois, on regarde dans son lit Pour voir si on n'a pas oublié son corps. Les matins font de la balançoire Avec des mannequins empaillés. Un jour, je dirai que je suis le plus fort Des humains, mais c'est pas pour tout de suite. Les hommes ont toujours une tête de plus Que les animaux, c'est pas pour ça Qu'il faut la couper. Je vais et je viens entre mes lèvres Pour goûter à ma vie, La vie qui est toujours plus douce Que la prunelle de mes yeux. Un ogre fait dans la dentelle, Une grand-mère s'assoupit près d'un lac, Une robe fait le tour du monde Pour vêtir Pluton. Un chat compte le nombre de vies Qu'il lui reste. Je ne reste pas au mois de septembre Dans ma porte, Je sors. Et je vis.

Un enfant

Un enfant s'en va En touchant du bout du doigt La lune. Les équipes de football Chantent l'hymne martien, Un chien court jusqu'à une main Pleine de nourriture. Le silence se réfugie dans une trompette, Des ramifications du soleil Se trouvent dans la bête de Dieu. Un ours infatigable sort de la douche. Ma peau fait le tour de mes os Et mes os tournent autour de la Terre. Je suis en lévitation, Je parcours le monde avec mes lèvres Et mon foie. Une porte s'occupe d'oublier les souvenirs. Mes yeux regardent vers le nord, Le Grand Nord. Et je m'endors Les oreilles bouchées.

Je reste

Je reste près de mes lèvres pour pas qu'elles s'en aillent. Les journées se font belles le matin puis tombent dans l'oubli Pendant un quart d'heure. Je regarde par la fenêtre les oiseaux pendouiller Et je prends mon café. Un homme cherche sa chaussure blanche Et son cœur noir pour s'envoler avec sa belle Sur une île paradisiaque. Des voitures se jettent par la fenêtre, Une montre se fait piquer par une aiguille, Le chat majestueux se pose sur mes genoux, Je me casse les reins, La douceur du printemps fait du bien Aux mamelons. Un tourne-disque vrombit, Un homme s'en va presque tout seul. Je ne sais pas ce qu'est un corps. Ça doit servir à faire chavirer La pensée.